Novembre 2019
Formation infirmière
Les membres du Conseil consultatif sur la formation infirmière du SIDIIEF sont heureux de vous présenter le 3e numéro du S@voir inf. – Formation infirmière, sur le thème du numérique dans la formation infirmière.
Comme le soulignaient Myrick et Pepin (2016), les technologies numériques sont apparues comme un « tsunami » qui ne laisse aucun milieu de formation en sciences infirmières indifférent. Si l’omniprésence de ces technologies transforme les pratiques dans toutes les sphères de nos vies, elle pénètre également, de manière déterminante, les domaines de la santé et de la formation. Les innovations se multiplient à une très grande vitesse et les infirmières y contribuent, tant en santé qu’en formation.
Pensons d’abord à l’apprentissage nécessaire que font les infirmières pour exercer leur profession à distance, dans le cadre d’environnements virtuels ou de télésanté de plus en plus présents. À titre d’exemple, Nagel, Dawm, Momtahan, Gifford, Doucet et Etowa (2017) ont mené une étude ayant pour but d’expliquer les processus d’apprentissage de l’infirmière pour connaître la personne dans un environnement virtuel utilisant la surveillance de la santé à distance. L’Association canadienne des écoles de sciences infirmières (ACÉSI, 2016) recommande d’ailleurs de former toutes les infirmières à une pratique clinique soutenue par les technologies numériques. Cette pratique englobe un nombre de plus en plus grand d’activités liées aux soins des personnes : aptitude à comprendre et à conseiller les personnes sur les informations de santé en ligne, à utiliser des applications mobiles de surveillance, à s’engager dans une communauté virtuelle de pratique et ainsi de suite.
Dans le domaine de la formation infirmière, une utilisation du numérique devenue omniprésente au cours des dernières années porte sur la simulation de situations cliniques, à l’aide de mannequins informatisés et, plus récemment, d’environnements virtuels. Les scénarios à créer sont multiples et permettent d’exposer plus d’apprenants à des situations critiques qu’ils pourraient ne pas avoir rencontrées au cours de leur formation. Si l’enthousiasme déborde pour cette méthode pédagogique, Lavoie, Michaud, Bélisle, Boyer, Gosselin, Grondin, et coll. (2018) soulignent l’importance d’élaborer les activités de simulation à partir de théories d’apprentissage existantes afin de mieux cibler les compétences à développer chez les apprenants et de mieux comprendre le mécanisme par lequel la simulation favorise leur développement. À titre d’exemple, Houzé-Cerfon, Boet, Marhar, Saint-Jean et Geeraerts (2019) ont pris en compte des facteurs sociologiques liés au travail d’équipe pour structurer une activité de débriefing en équipe interprofessionnelle. Les auteurs soutiennent l’importance d’utiliser des outils d’évaluation spécifique au travail d’équipe pour comprendre l’apport de la simulation à l’amélioration du travail d’équipes de soins critiques.
De plus, les formations virtuelles et en ligne, élaborées pour le développement de compétences professionnelles dans le cadre de programmes d’études ou de formation continue, foisonnent. Il importe que l’ensemble des innovations pédagogiques assistées du numérique, incluant les formations en ligne, soient élaborées à partir d’assises théoriques et qu’elles fassent l’objet d’évaluation quant à leurs retombées sur l’apprentissage ou sur les changements dans la pratique. À titre d’exemple, une formation e-Learning pour les infirmières en exercice (Gentizon, Kottelat, et Hamel-Lauzon, 2019) a fait l’objet d’une évaluation formelle utilisant l’échelle des niveaux d’apprentissage de Kirkpatrick et Kirkpatrick (2006). Dans ce même ordre d’idées, nous vous invitons à lire une revue de la portée (Deschênes, Goudreau, Fontaine, Charette, Da Silva, Maheu-Cadotte et Boyer, 2019) et des revues systématiques récentes (Fontaine, Cossette, Maheu-Cadotte, Mailhot, Deschênes, Mathieu-Dupuis, et al, 2019; Rouleau, Gagnon, Côté, Payne‑Gagnon, Hudson, Dubois et Bouix-Picasso, 2019) qui font état des connaissances actuelles sur certains aspects de la création et de l’évaluation de formations en ligne pour les infirmières et d’autres professionnels de la santé.
Nous vous souhaitons bonne lecture de ce numéro du S@voir inf. – Formation infirmière !
Faites-nous part de vos commentaires.
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Source : Nagel, D.A., Dawm, S., Momtahan, K., D. Gifford, W., Doucet, S.,et Etowa, J.B. (2017). « Getting a Picture: A Grounded Theory of Nurses Knowing the Person in a Virtual Environment ». Journal of Holistic Nursing, 35(1). https://doi.org/10.1177/0898010116645422
La prestation de soins par les infirmières dans les environnements virtuels augmente rapidement grâce à l’utilisation croissante des technologies de télésanté (comme la surveillance à distance) pour faciliter l’accès aux soins de santé. Les avantages de la prestation de soins à l’aide de technologies de télésanté sont reconnus et étudiés par plusieurs auteurs soit : un accès accru aux soins, à de meilleurs résultats de santé et à une prestation de services plus rentable. Cependant, à ce jour, aucun chercheur ne semble s’être intéressé à comprendre comment l’infirmière intègre le télésoin à sa pratique clinique. Comment celle-ci effectue le passage des interactions traditionnelles en présentiel avec la personne dans un environnement virtuel, sachant que le sentiment de présence, souvent associé à la connaissance du patient, est un concept considéré comme essentiel aux relations thérapeutiques, à la prise de décisions cliniques et à la prestation de soins en soins infirmiers ?
Le but de cette étude était donc d’expliquer les processus d’apprentissage de l’infirmière pour connaître la personne dans un environnement virtuel utilisant la surveillance à distance. L’étude reposait sur la théorisation ancrée constructiviste de Charmaz (2006, 2014), et la réalisation de 33 entretiens et 5 expériences d’observation d’infirmières utilisant cette technologie dans 7 contextes différents. Au total, 22 infirmières de 7 programmes de télésanté diversifiés, provenant de deux provinces canadiennes (Ontario et une province de l’Atlantique), ont participé à l’étude. Des services de télésanté ont été fournis aux personnes à leur domicile ou dans leur communauté (zones rurales et urbaines) en autogestion de maladies chroniques ou pris en charge à la suite d’interventions postopératoires. Les infirmières participant à l’étude ont également utilisé d’autres formes de technologie pour échanger des informations, tels que téléphone, dossiers médicaux électroniques et caméras vidéo. Dans la moitié des programmes, la surveillance à distance était utilisée conjointement avec des visites à domicile en face à face milieu communautaire ou clinique.
Les résultats de l’étude indiquent que décrire la situation de la personne est au cœur du processus de la connaissance du patient. Différentes étapes du processus (entrer dans le programme, connecter avec la personne, partager et réviser l’information, reconnaître les modèles et les tendances et analyser la situation) ont été identifiées. La visualisation d’une image mentale holistique et contextualisée implique un échange dynamique d’information entre l’infirmière et le patient. Ce que les infirmières ont rapporté démontre qu’il importe de prendre en considération tous les éléments du contexte social, religieux et spirituel de la personne qu’on ne voit pas. Il ne faut pas se fier uniquement aux paramètres vitaux et physiologiques. Les informations additionnelles viennent objectiver les résultats obtenus. Les infirmières comparent ce processus à la réalisation d’un casse-tête. Chaque réponse obtenue aux questions posées est une pièce et finalement on obtient l’image complète du patient ce qui permet de faciliter le partenariat de collaboration.
En bref, rappelons que l’approche de Charmaz respecte les éléments de la théorisation ancrée originale de Glaser et Strauss (1967), mais la théorie qui en découle est plutôt construite que découverte (Jacques, St-Cyr Tribble, et Bonin). Même si des étapes du processus d’apprentissage ont été documentées, elles peuvent toutefois donner un portrait erroné de la personne. Se faire une image dans le cadre de l’utilisation des technologies est un processus complexe et dynamique dans la dispensation de soins virtuels appropriés, holistes et sécuritaires pour la clientèle. Obtenir une image nécessite des compétences plus développées que celles qui découlent actuellement de l’enseignement général des infirmières. Dans la foulée des études empiriques qui explorent le phénomène de la création de la relation ou du lien infirmière-patient dans un environnement virtuel, se faire une image qu’offre une théorisation ancrée éclaire les processus et les considérations pour la dispensation de soins infirmiers dans cet environnement de pratique. Alors que des études antérieures (Arnaert et coll., 2012; Greenberg, 2009) ont placé la connaissance de la personne comme thème dans la pratique infirmière à distance, cette étude fait une nouvelle contribution en se concentrant sur la connaissance de la personne à soigner dans ce contexte.
Considérant qu’il est impératif que les infirmières offrent des soins éthiques et sécuritaires s’appuyant sur les meilleures pratiques, les résultats de cette étude peuvent servir à guider les infirmières dans leurs télésoins, orienter les programmes d’enseignement pour la formation initiale, les politiques qui soutiennent les infirmières qui exercent en télésoins et donner des orientations pour la poursuite de recherche dans le domaine.
Source : Association canadienne des écoles de sciences infirmières. (2016). Solutions de santé grand public : une ressource d’enseignement et d’apprentissage pour la formation en sciences infirmières. Ottawa: Ontario.
https://www.casn.ca/wp-content/uploads/2016/04/FR-SB-Consumer-Health-Solutions-Nursing-Faculty-Resource.pdf
En 2011, l’Association canadienne des écoles de sciences infirmières (ACESI) a lancé une initiative en partenariat avec Inforoute Santé du Canada (Inforoute) visant à favoriser l’intégration de la santé numérique dans le cadre de la formation infirmière de premier cycle. Cette initiative vise également à assurer que les cliniciens, une fois leurs études terminées, soient en mesure de pratiquer dans un environnement facilité par la technologie, et à profiter de ses avantages. En dehors des étudiants infirmiers, cette ressource est utile pour les infirmières prodiguant des soins directs, les infirmières occupant des fonctions gouvernementales ou reliées aux politiques, et les responsables de la formation d’autres groupes de professionnels de la santé
Le présent document, divisé en six sections, présente les six domaines clé des solutions de santé grand public (SSGP), à savoir : les ressources et informations en ligne sur la santé, les moniteurs de santé et d’activité portables, les applications mobiles dans le domaine de la santé, les communautés virtuelles, télésurveillance des patients, la télésanté et les visites virtuelles, et les portails-patients et les dossiers de santé personnels.
Les auteurs émettent des réserves quant à la qualité de l’information relative à la santé recueillie par les patients dans les médias sociaux. Ils suggèrent aux étudiants infirmiers d’être conscients du risque de propagation d’information de piètre qualité et de faire la distinction entre les bonnes et les mauvaises sources. Enfin, ils suggèrent que les étudiants puissent disposer d’outils les permettant d’évaluer les sites.
Au regard de l’augmentation du nombre de personnes qui possèdent des téléphones intelligents et des nombreuses applications mobiles en matière de santé, les auteurs soulèvent la problématique liée à la sécurité des données personnelles. Tout en reconnaissant qu’il existe des applications fiables et valides, les auteurs mentionnent que cet outil permet de rapprocher les infirmières, les fournisseurs de soins et les clients.
Les moniteurs de santé et d’activité portables permettent de surveiller l’état de santé et de mesurer plusieurs éléments tels que la fréquence cardiaque, les calories, le régime alimentaire, etc. Ils sont d’une grande importance, car ils permettent aux utilisateurs de jouer un rôle actif dans le maintien de leur santé et de changer concrètement leur mode de vie. Toutefois, des critiques ont été faites au sujet du manque de réglementation et de conformité des appareils avec la législation sur la protection des renseignements personnels.
Par ailleurs, les communautés virtuelles offrent aux patients et à leurs familles un moyen de partager des informations et des expériences, d’obtenir du soutien de leurs pairs et réseauter avec d’autres personnes en lien avec leurs besoins en matière de santé. Ces communautés permettent d’améliorer l’état de santé des patients, le partage d’information et visent à mettre en relation des gens ayant des problèmes de santé similaires afin qu’ils puissent partager leurs histoires, leurs expériences, et des renseignements pertinents. Toutefois, la principale préoccupation est concernant la possibilité que les membres émettent de fausses informations.
L’utilisation de la télésurveillance des patients permet aux patients d’assurer un suivi régulier par des infirmières ou d’autres professionnels de la santé. Elle permet d’éviter des visites en personne sans entraîner de risques sur la santé, d’économiser du temps et de l’argent, etc. Il permet aussi un suivi en temps réel et évite aussi des visites médicales inutiles. Cet outil a de nombreuses répercussions positives pour la pratique infirmière et les soins aux patients. Toutefois, des inquiétudes au niveau de la confidentialité des données personnelles sont évoquées.
Enfin, il existe des portails qui permettent aux patients d’accéder à une partie ou à la totalité du contenu de leur dossier médical (p.e. : antécédents médicaux, allergies, etc.). Certains avantages de l’utilisation de portails-patients peuvent être l’augmentation de la participation des patients dans les décisions liées aux soins, une meilleure communication avec les professionnels de la santé, l’adhésion à des changements comportementaux et le respect de la médication prescrite ainsi qu’une meilleure gestion des soins lors de transitions. Toutefois, des préoccupations résident sur la sécurité de l’information contenue dans les portails et la multiplication des portails-patients.
Il ne s’agit pas d’une étude en tant que telle, mais d’un guide afin d’emmener l’étudiant infirmier à maîtriser l’outil informatique sous ses différents angles. Ce guide est d’une grande utilité, car il présente l’aperçu de l’activité, la description de l’activité pédagogique, les résultats d’apprentissage, les suggestions d’évaluation, etc. Tout cela permet aux enseignants d’atteindre les objectifs visés par le guide d’Inforoute. Par ailleurs, pour chaque activité, les auteurs présentent des articles : ce qui favorise l’intégration desdits objectifs. Malheureusement, un point faible à ce guide est qu’il ne présente pas de conclusion. Toutefois, des critiques sont émises tout au long du texte. Ce document est d’une grande utilité, car il permet en tant qu’enseignant d’insérer un module de formation sur l’utilisation de la technologie. Ce sujet est pertinent, car nous vivons dans un monde où la technologie a pris une place très importante dans notre quotidien.
Source : Lavoie, P., Michaud, C., Bélisle, M., Boyer, L., Gosselin, É., Grondin, M. et Pepin, J. (2018). « Learning theories and tools for the assessment of core nursing competencies in simulation : A theoretical review ». Journal of Advanced Nursing, 74(2), 239‑250. https://doi.org/10.1111/jan.13416
L’apprentissage axé sur les compétences a été adopté par la communauté médicale dans le nouveau millénaire (Lavoie et coll., 2018). Pour ces auteurs qui citent Tardif (2006), une compétence peut être définie comme une connaissance complexe de la façon d’agir en fonction de la mobilisation efficace et de la combinaison d’une variété de ressources internes et externes dans une famille de situations. La simulation est une stratégie d’apprentissage actif importante utilisée dans la formation en soins infirmiers.
Les outils existants pour mesurer les compétences ne mesurent que les connaissances, les habiletés et les attitudes de façon distincte. Aussi, l’étude avait pour but de déterminer les théories utilisées pour expliquer l’apprentissage en simulation et examiner comment ces théories ont guidé l’évaluation des résultats d’apprentissage liés aux compétences de base chez les étudiantes en sciences infirmières de premier cycle. Une revue systématique est réalisée dans six bases de données, en définissant une vaste stratégie de recherche pour récupérer des documents décrivant la simulation dans l’enseignement des soins infirmiers.
À l’issue du processus de sélection, 182 articles ont été retenus pour être exploités. Elles utilisaient exclusivement des mannequins, dont la plupart étaient de haute-fidélité.
Les résultats montrent que 103 articles ont explicitement identifié une ou plusieurs théories. Le cadre de conception pédagogique le plus souvent cité était le National League for Nursing /Jeffries Simulation Framework et d’autres théories d’apprentissage étaient fréquentes : la théorie de l’apprentissage expérientiel de Kolb (1984) et l’inventaire du style d’apprentissage (Kolb et Hay, 1999), suivies de la théorie cognitive sociale et du concept d’auto‑efficacité de Bandura (1986).
Au total, 87 études (47,8 %) ont utilisé un outil ou une combinaison d’outils conçus spécialement pour l’étude, y compris des mesures à l’échelle de type Likert des perceptions des élèves, des questions pour évaluer les connaissances des étudiants, des questions ouvertes et l’échelle d’évaluation du rendement des apprenants, entre autres.
En outre, ils rapportent que dans les études où le cadre de simulation/Jeffries a été utilisé comme cadre principal, les résultats les plus fréquents étaient la confiance en soi des apprenants, la satisfaction et la perception de la simulation.
Aussi, dans les études qui citent la théorie de Kolb sur l’apprentissage expérientiel ou les styles d’apprentissage, les résultats les plus fréquents étaient les connaissances des apprenants et leur satisfaction, mesurées principalement au moyen d’outils conçus spécialement pour l’étude. Les études qui citent Bandura mesuraient principalement l’auto-efficacité et la seule tendance était l’utilisation des outils conçus spécialement pour l’étude.
La principale force de cette étude résulte du devis utilisé. En effet, la revue systématique des écrits est une démarche rigoureuse, transparente et reproductible visant à identifier et à sélectionner des études pertinentes qui traitent d’une question clairement définie et à en faire une analyse exhaustive ainsi qu’une synthèse critique (Landry et coll., 2008).
Comme limite, on pourrait noter que la qualité des articles n’a pas été évaluée.
Selon Simoneau, Ledoux, et Paquette, (2012), la simulation clinique est la plus récente et la plus étudiée des approches pédagogiques à faire son apparition dans les programmes de formation en santé. Elle fait aujourd’hui partie intégrante de nombreux programmes de formation infirmière à travers le monde. Toutefois, la simulation se pratique avec beaucoup d’insuffisance dans les écoles de formation en soins (Alinier, Harwood, Harwood, et Montague, 2008). Aussi, cette recherche permettra de corriger les insuffisances liées à la réalisation et l’évaluation des résultats des simulations et l’amélioration de cette technique pédagogique à travers des recherches futures.
Les auteurs ont conclu qu’il est crucial que des études soient menées sur les processus d’apprentissage impliqués dans la simulation et la façon dont les différentes caractéristiques de la simulation favorisent ou entravent l’apprentissage. Ils soulignent par ailleurs que les futures études devraient utiliser et valider les théories d’apprentissage existantes dans le contexte de la simulation afin de mieux comprendre le mécanisme par lequel la simulation rend hommage aux compétences infirmières de base. Pour terminer, ils estiment que des recherches ultérieures sont nécessaires pour déterminer les étapes de l’élaboration des compétences infirmières.
Dans l’ensemble, les idées émises dans le texte sont pertinentes pour la discipline infirmière, car elles permettront à la communauté infirmière de standardiser les théories qui guident la simulation et la conduite de la simulation ainsi que la réalisation des résultats à travers la production d’outils validés. Des recherches sont nécessaires pour produire des connaissances sur la base des axes/thèmes identifiés dans l’article.
Ce travail a le mérite de mettre en évidence un certain nombre d’insuffisances concernant l’utilisation de la technique de la simulation dans les institutions de formation en soins infirmiers. Les formateurs en soins infirmiers pourraient s’appuyer sur les insuffisances identifiées pour améliorer la pratique de la simulation dans tous ses aspects.
Source : Houzé-Cerfon, C.-H., Boet, S., Marhar, F., Saint-Jean, M. et Geeraerts, T. (2019). L’éducation interprofessionnelle des équipes de soins critiques par la simulation : concept, mise en oeuvre et évaluation. La Presse Médicale, vol. 48, no 7-8, Juillet-Août 2019, pp. 780-797 https://doi.org/10.1016/j.lpm.2019.07.001
Les auteurs, issus de l’Université de Toulouse, médecins spécialistes urgentistes, intensivistes et réanimateurs, ont été accompagnés dans leur démarche par une docteure en sciences de l’éducation. Leur revue de littérature met en exergue les enjeux d’une simulation interdisciplinaire de situation de crise. Les compétences développées par ce nouveau modèle d’apprentissage auraient un impact sur la pratique, la qualité des soins, et le devenir des patients. L’objectif est d’acquérir des soft skills permettant aux personnels soignants d’offrir des services complets amenant satisfaction, sécurité et garantie le devenir du patient. Les auteurs pointent les risques en cas de prise en charge en situation critique, le stress, le degré d’incertitude et la pression temporelle sont des facteurs défavorables au travail d’équipe. Les études présentées démontrent qu’une pratique interprofessionnelle efficace entraîne une diminution significative de la mortalité en cas d’arrêt cardiaque intra-hospitalier. Cette pratique interprofessionnelle requiert des compétences individuelles, sociales et organisationnelles. Ces notions de « coaching interdisciplinaire » ne sont pas ou peu implémentées dans les formations initiales des différents intervenants. La simulation comme pratique d’apprentissage se développe de plus en plus dans les cursus, mais encore trop souvent en silo. Des points d’attention doivent être considérés, il est indispensable que les enseignants s’appuient ensemble sur un message commun lors du briefing. Entre autres choses, les scénarios doivent permettre de résoudre les questions liées aux différents rôles, à leur responsabilité et aux règles d’autorité et d’influence dans la prise de décision ou de la communication et ceci en lien avec le contexte sociologique. Les coûts et faisabilité de ces méthodes sont mis en balance avec la durée de l’impact sur la qualité des soins, car il manque d’études approfondies sur le sujet. La simulation ne peut être efficace sans débriefing, celui-ci permet d’améliorer les pratiques et de corriger les faiblesses. Cette étape, ce temps réflexif indispensable, doit faire face aux différents freins sociétaux liés tant à l’identité sociale, qu’aux compétences et craintes quant à la progression professionnelle.
Les auteurs soulignent qu’il n’existe actuellement aucune méthode de référence de débriefing interprofessionnel. De nombreux outils sont proposés dans la littérature, chaque besoin de formation étant spécifique. Il s’avère dès lors nécessaire d’établir en collaboration interdisciplinaire non seulement les critères d’évaluation, mais aussi l’ensemble de la démarche jusqu’au débriefing et le rôle des formateurs. Enfin si l’on comprend l’évidence des avantages de cette nouvelle pratique de formation, il est important que celle-ci soit fidèle aux réalités de terrain de fonctionnement des praticiens, des équipes au sens large et aux contextes sociologiques.
Cette analyse s’inscrit dans l’air du temps, de nouveaux modèles de formation doivent voir le jour afin de répondre au mieux aux attentes des professionnels de demain. Si ces modèles d’apprentissage sont développés au sein de nos cursus, les futurs professionnels que nous formons s’inscriront dans un processus d’apprentissage tout au long de la vie dans le respect du « métier de l’autre ».
Source : Gentizon, J., Kottelat, Y. et Hamel-Lauzon, G. (2019). Le savoir au service des patients : évaluation du transfert des connaissances auprès d’infirmiers-ères, après une formation e-Learning sur la gestion de la douleur. Science of Nursing and Health Practices – Science infirmière et pratiques en santé, vol. 2, : Iss. 1, article 4. – https://doi.org/10.31770/2561-7516.1028
L’étude mise à l’honneur concerne la mise en place d’une formation continue en e-learning sur la gestion de la douleur à destination de professionnels (infirmiers et personnels d’assistance) dans un Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Suisse francophone.
Elle vise à évaluer le transfert des connaissances à l’issue d’une formation e-Learning sur la douleur, auprès de 47 infirmiers et personnels d’assistance d’une unité de réadaptation gériatrique.
S’appuyant sur un cadre de référence étoffé, l’évaluation du transfert des connaissances s’inscrit dans le modèle d’évaluation de la formation de Kirkpatrick (2006).
Du point de vue du design de l’étude, une triangulation des sources est opérée, lui donnant une assise scientifique. Tout d’abord, un questionnaire de satisfaction et un questionnaire de connaissances sont remplis par les professionnels. Ensuite, une analyse des dossiers-patients est réalisée. Puis l’évaluation est complétée par des entretiens de groupe auprès des professionnels.
Suite à cette formation, malgré une acquisition de connaissances et une satisfaction élevée de la part des professionnels, l’analyse des dossiers patients donne à voir une application restreinte des recommandations de bonnes pratiques en matière de dépistage et d’évaluation de la douleur. Les auteurs ont alors analysé les entretiens pour en déduire les raisons.
Parmi ces raisons, il est à noter les caractéristiques des personnes formées, les composantes du contexte et du milieu de soin ainsi que les facteurs liés à la conception de la formation.
Au total, la méthode retenue répond à des critères de scientificité. Les limites méthodologiques sont soulignées. Les relations établies entre les observations semblent exactes dans la mesure où elles découlent stricto sensu de l’approche théorique. Néanmoins, l’indépendance des analyses et des interprétations pourrait être contrôlée par des chercheurs extérieurs (en double insu) afin de gagner en fidélité.
En résumé, la portée de cette étude est intéressante pour la profession infirmière et les processus d’apprentissage. Elle met en exergue que pour générer un changement de pratiques professionnelles, une formation, même si elle est pourvoyeuse d’acquisitions et qu’elle donne satisfaction, ne suffit pas. Nous en déduisons que pour optimiser le transfert des connaissances, une vigilance est à porter sur les freins présents au niveau des espaces de travail et des dimensions individuelles. La formation est certes un outil d’accompagnement des changements. Pour autant, elle devient vite caduque si elle n’est pas étayée et intégrée dans une réflexion contextuelle afin de prendre en considération les facteurs de réussite à son implémentation dans les environnements de travail. Les enseignements à tirer de cette étude sont riches, car ils renforcent l’idée de l’amélioration des services rendus aux patients si un partenariat intégratif existe entre les professionnels soignants et les instituts de formation. L’ancrage des connaissances et des compétences des professionnels est en effet largement facilité par une co-construction des stratégies d’accompagnement.
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