Novembre 2022
Formation infirmière
Ce numéro du S@voir inf. – Formation infirmière accueille des articles traitant de stratégies d’apprentissage, dont l’histoire de cas et les jeux sérieux, ainsi que d’apprentissage par les pairs, à partir du regard d’étudiantes et d’étudiants.
Au centre de ces préoccupations, vous trouverez des témoignages de la communauté étudiante sur l’expérience d’apprendre les soins infirmiers. Est-ce un apport suffisant pour s’imprégner de la perspective étudiante? Cette voix est-elle soutenue et encouragée dans le développement des cours, des programmes, dans la conception et le déploiement des projets de recherche et dans les comités pédagogiques influant l’organisation académique et la pédagogie? Voilà un pan du savoir, celui de la voix étudiante qui fait maintenant l’objet de recherche afin d’en préciser la nature. Trois concepts sont évoqués : la transformation, la participation et l’« empowerment » (Ha, 2018; Subramanian et coll., 2012). Dans un examen de la portée, Ha (2018) explique que la voix étudiante, entendue et prise en compte par les responsables universitaires et le corps professoral, transforme le cheminement étudiant et contribue à l’enrichissement et à la transformation de cours ou de programmes. Cette transformation survient lorsque les représentants étudiants sont invités à participer aux instances décisionnelles et influentes, et que leur voix donne réellement un pouvoir d’agir et une coresponsabilité dans la prise de décisions pédagogiques. Toutefois, Ha (2018) souligne que la communauté étudiante était peu présente dans les comités stratégiques. Le point de vue selon lequel cette communauté n’a pas les connaissances et les compétences requises pour discuter d’enseignement et d’apprentissage était bien ancré. Aujourd’hui, la voix étudiante, dans la mouvance des travaux sur le partenaire de soins et de recherche, commence à intéresser les acteurs clés des institutions d’enseignement, car sa voix est centrale pour juger de l’efficacité et de la pertinence des apprentissages réalisés en vue d’accéder à la profession infirmière.
La voix étudiante en sciences infirmières est, entre autres, un savoir sur l’expérience d’apprendre. Certains commentaires étudiants, recueillis sur les stratégies d’apprentissage de personnes étudiantes au doctorat de l’Université de Sherbrooke (Québec, Canada), illustrent cette voix, par exemple, le commentaire suivant : […] Ma principale stratégie d’apprentissage personnelle est ma structure de prise de notes. […] j’écris avec des mots-clés et je me mets plusieurs exemples. […] soit j’utilise des tableaux résumés ou je réalise une carte conceptuelle (p. ex. avec C-map tool). Après […], je fais plusieurs fois la lecture, pour, finalement, m’installer devant ma caméra et m’auto-enseigner ma matière dans mes mots avec le soutien de mon résumé. (Marie-Josée Émond[1]). L’expérience d’étude, similaire aux autres commentaires étudiants, ne se limite pas à la mémorisation, mais vise des stratégies cognitives d’élaboration et d’organisation des connaissances, lesquelles sont reconnues plus efficaces pour développer le raisonnement clinique : prise de notes par mots-clés, tableaux, schémas, cartes conceptuelles, auto-enseignement et explication de concepts avec des collègues. Le témoignage d’une étudiante de 3e année à la Faculté des sciences infirmières de l’Université Saint-Joseph de Beyrouth (Liban) relate les avantages d’apprendre à partir d’histoire de cas, comme la compréhension de la globalité de la personne soignée, le renforcement et le développement du jugement clinique. Aussi, le point de vue étudiant est exploré dans cette recherche de Lechasseur et coll. (2022) sur l’utilisation du SNAPPS (Summarize, Narrow, Analyse, Probe the preceptor, Plan managment et Self-directed learning) qui est une stratégie pédagogique utilisée en clinique pour favoriser le développement du raisonnement clinique. Enfin, l’introduction d’une méthode de simulation par le jeu sérieux (serious game) a été testée auprès de deux promotions étudiantes et a conduit à des changements pour améliorer l’apprentissage (Brito et coll., 2022).
La voix étudiante en sciences infirmières, c’est aussi un savoir-agir qui se développe progressivement par la mobilisation et la combinaison de plusieurs sources de connaissances afin d’intervenir dans un contexte spécifique de soins. Ce savoir pourrait-il être mis à profit auprès de personnes étudiantes de niveau moins avancé? L’apprentissage assisté par les pairs (AAP) jumèle une personne mentor de niveau plus avancé avec un(e) ou plusieurs mentoré(e)s de niveau moins avancé. Dans une revue de la portée, Williams et Reddy (2016) ont noté une amélioration significative des apprentissages des personnes qui assument le rôle de mentor. Plus récemment, dans une revue systématique comprenant 27 essais contrôlés randomis